SIDATTES 2025 : La recherche et l’innovation au service de la durabilité des oasis marocaines

L’Institut National de la Recherche Agronomique (INRA) a organisé le 30 octobre, en marge du Salon International des Dattes à Erfoud, une journée scientifique sous le thème : « La recherche et l’innovation au service de la durabilité des oasis et de la gestion de l’eau ».

Cet événement, tenu en partenariat avec l’ANDZOA, l’ICARDA et la FAO, a réuni des experts nationaux et internationaux pour échanger sur les solutions concrètes permettant de préserver les écosystèmes oasiens.

Cette journée a servi de plateforme d’échanges pour discuter des solutions concrètes et explorer comment la recherche peut offrir de nouvelles perspectives et des approches efficaces pour le développement durable des oasis.

La filière phoenicicole occupe une place stratégique dans le développement économique et social des zones oasiennes du Maroc. Elle couvre 69 000 hectares, dont 80 % dans la région Drâa-Tafilalet, et génère un chiffre d’affaires annuel de 2 milliards de dirhams et 3,6 millions de journées de travail, profitant à environ 2 millions de personnes. Le palmier dattier joue également un rôle essentiel dans la préservation des écosystèmes oasiens.

Dans le cadre de la stratégie Génération Green 2020–2030, le Maroc ambitionne de planter 5 millions de palmiers dattiers, d’atteindre une production de 300 000 tonnes, d’augmenter le taux de valorisation à 10 %, et de porter les exportations à 70 000 tonnes, consolidant ainsi la durabilité et la compétitivité de cette filière clé.

Pour atteindre ces objectifs ambitieux, la recherche scientifique et l’innovation technologique se positionnent comme des leviers essentiels.

L’INRA pilote l’innovation pour la filière dattière

La recherche et le développement pilotés par l’INRA, sont au cœur de la modernisation de la filière phoenicicole marocaine. Les efforts se concentrent sur la réhabilitation des palmeraies, l’amélioration des techniques d’irrigation et de gestion numérique, ainsi que sur la valorisation des dattes.

« Parmi nos priorités figurent l’amélioration génétique des palmiers dattiers, la classification des variétés marocaines et la création de nouvelles souches ( une quarantaine à ce jour ), ainsi que le développement de variétés résistantes à la sécheresse, un enjeu majeur pour une gestion durable de l’eau », explique Pr Lamiae Ghaouti, directrice de l’INRA.

Les résultats sont prometteurs : plus de 170 000 souches issues de 10 variétés ont été produites, un génotypage précis a été réalisé sur une trentaine de variétés marocaines, et les nouvelles techniques permettent 20 à 30 % d’économie d’eau. Des cartes de fertilité des sols oasiens ont été établies, des techniques de pollinisation améliorées mises au point, et des méthodes de conservation et de lutte intégrée développées, contribuant ainsi à la durabilité et à la performance de la filière.

Parmi les innovations phares, l’INRA met en avant « l’irrigation déficitaire, qui permet d’utiliser 40 % de moins d’eau tout en maintenant la productivité », ainsi que des techniques comme « le paillage, qui limite l’évaporation » et « les outils numériques et l’intelligence artificielle pour une gestion efficace et raisonnée de l’eau ». Ces approches visent à garantir « une utilisation efficiente et pertinente de la ressource rare qu’est l’eau ».

L’INRA mène plusieurs projets de recherche et d’innovation pour renforcer la résilience des oasis face au changement climatique, préserver leur patrimoine génétique et promouvoir une agriculture durable fondée sur la science et la technologie.

Dans cette optique, l’Institut a signé le 29 octobre à Erfoud, une convention avec l’ANDZOA et l’Organisation Arabe pour le Développement Agricole (OADA) pour renforcer la durabilité des systèmes oasiens et des arganeraies et la valorisation de la filière dattière. Selon Pr Ghaouti « L’objectif est le transfert d’expertise aux acteurs de terrain afin d’assurer une mise en œuvre et une adoption réussies de l’ensemble de ces solutions et innovations technologiques. » 

Oasis marocaines : patrimoine et ressources préservés

Le Maroc déploie plusieurs programmes pour un développement équilibré de ses zones oasiennes, qui couvrent 32 % du territoire. Le Programme de Réduction des Disparités Territoriales et Sociales (PRDTS) a investi 9,5 milliards DH dans les infrastructures et les services de base, tandis que le Programme National des Systèmes Ingénieux du Patrimoine Agricole, reconnu par la FAO, œuvre à la préservation des oasis, de la biodiversité et des savoir-faire locaux.

M. Abdel Hak Laiti, assistant du représentant de la FAO au Maroc, a souligné lors de son intervention dans la Journée scientifique, l’engagement de l’organisation pour la préservation des oasis, un patrimoine cultivé depuis des siècles. La FAO participe à cet événement depuis sept ans et travaille depuis plus de 40 ans avec le Maroc sur la production agricole et la protection des cultures oasiennes contre des maladies telles que le bayoud ou le charançon rouge.

Des études et des approches sont mises en œuvre pour améliorer la mobilisation des ressources en eau, tant de surface que souterraines, et pour garantir une gestion intégrée, équitable et durable. « Le Maroc vit dans une rareté de l’eau mais l’impact de sa rareté sur l’espace oasien est énorme. »

M. Laiti a également souligné l’importance des savoir-faire locaux : « Les agriculteurs ont développé ici, depuis des années et des siècles, une ingéniosité pour résister et maintenir leur vie dans ces régions. » La FAO accompagne ce patrimoine, en particulier à travers la reconnaissance de trois oasis marocaines comme « systèmes ingénieux du patrimoine agricole mondial ».

De son côté, M. Mohammed Bengoumi, Responsable régional en Production et Santé animales au Bureau Sous-Régional de la FAO pour l’Afrique du Nord, a insisté sur l’importance de la durabilité des systèmes oasiens et de la gestion des ressources hydrauliques : « La FAO dans la région MENA considère les oasis comme une priorité. » Il a souligné le rôle exemplaire du Maroc : « Le Maroc est considéré comme un pays leader en matière de développement durable des oasis. » 

Gestion participative de l’eau dans les zones oasiennes

La stratégie Génération Green accorde une importance majeure à la gestion durable de l’eau dans les zones oasiennes. D’ici 2030, les ambitions portent sur la conversion de 30 000 ha supplémentaires à l’irrigation localisée et la réhabilitation de 245 khettaras sur plus de 400 km, consolidant ainsi la résilience hydrique et agricole des oasis marocaines.

M. Zakaria Yacoubi, Directeur de l’Irrigation et de l’Aménagement de l’Espace Agricole au Ministère de l’Agriculture, a présenté les programmes de gestion de l’eau dans les zones oasiennes, structurés en deux axes principaux : « le contrôle de l’offre ou le soutien à la ressource en eau » et « l’amélioration de l’efficacité de l’utilisation de l’eau pour l’irrigation ».

Concernant la modernisation de l’irrigation, M. Yacoubi a précisé : « environ un quart des interventions menées depuis 2008 concernent la modernisation des systèmes d’irrigation et le passage à l’irrigation économisant l’eau , avec près de 95 000 hectares moderniséset près de 420 kilomètres de canaux rénovés ces dernières années . »

Pour Moulay M’hamed Slimani, Chef de la Division Évaluation et Planification des Ressources en eau à l’Agence Bassin Hydraulique du Guir-Ziz-Rhéris, la durabilité des ressources en eau dans les zones oasiennes repose sur la concertation : « Il est nécessaire de travailler de manière participative et consultative avec tous les intervenants concernés, en particulier les utilisateurs de l’eau et les agriculteurs, ainsi que les administrations, les autorités et tous les acteurs impliqués. » 

Pour garantir la durabilité des nappes, l’agence installe également des compteurs dans les puits agricoles, un projet réalisé en partenariat avec les agriculteurs afin de « mesurer les volumes extraits, mettre à jour les données et assurer la durabilité des ressources ».

L’IAV : Former pour protéger les oasis

L’Institut agronomique et vétérinaire Hassan II se distingue par son approche pratique et immersive. Les programmes de formation combinent théorie et terrain, avec un système de stages reconnu pour son excellence. « Tous les étudiants passent par des stages sur le terrain et des expériences d’exploitation », a rappelé M. Mohammed Yessef, Directeur Adjoint de la Coopération, du Partenariat et du Développement à l’Institut agronomique et vétérinaire Hassan II soulignant l’importance de l’observation directe et des études réalisées dans l’apprentissage.

La recherche scientifique est également au cœur des activités de l’Institut. Doctorats, masters et projets de fin d’études explorent tous les aspects de l’oasis, allant de l’eau aux techniques agricoles modernes comme le goutte-à-goutte. L’innovation technologique est au rendez-vous : « Nous avons aujourd’hui l’école de topographie qui utilise la télédétection et l’intelligence artificielle. Nous sommes passés des recherches traditionnelles anciennes à des recherches très importantes et avancées. »

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